Résumé
Au cours de l'année 2021, 17 nouveautés médicamenteuses sur les 108 ayant fait l'objet d'une analyse avec cotation dans Prescrire ont apporté un progrès important ou notable pour les patients.
Tous les mois, Prescrire publie une analyse indépendante, comparative et méthodique des nouveautés concernant les médicaments : nouvelles substances, nouvelles indications, nouvelles formes pharmaceutiques, etc. Prescrire suit aussi de près leurs effets indésirables, les arrêts de commercialisation et les retours sur le marché, les nouvelles données d'évaluation clinique de médicaments déjà autorisés, les retraits du marché ou les ruptures de stock. La réglementation des produits de santé fait aussi l'objet d'une veille, particulièrement au niveau de l'Union européenne. L'objectif est d'aider les abonnés à distinguer, parmi les nouveautés médicamenteuses, celles qui apportent un progrès pour les soins de celles qui s'ajoutent sans progrès, voire qui n'auraient pas dû être autorisées vu les incertitudes et leur dangerosité.
17 progrès importants ou notables sur 108 nouveautés
En 2021, 108 nouveautés médicamenteuses ont été cotées par Prescrire (voir le tableau "10 ans de cotations des nouvelles spécialités ou indications dans Prescrire").
Un certain progrès a été apporté par 36 nouveautés, soit un tiers des analyses publiées, ce qui est un peu mieux que les 5 années précédentes. Ce progrès a été important pour 3 d'entre elles (cotées "Intéressant"), et notable pour 14 autres (cotées "Apporte quelque chose") : 5 dossiers concernent l'évaluation de vaccins covid-19. Pour 19 nouveautés, il s'agit d'un progrès moindre (cotées "Éventuellement utile").
Cette année, comme l'année dernière, environ la moitié des nouveautés n'ont pas apporté de progrès (51 cotées "N'apporte rien de nouveau" sur 108). Les données de l'évaluation de 12 nouveautés n'ont pas permis de déterminer leur balance bénéfices-risques (cotées "Ne peut se prononcer"). Enfin, 9 nouveautés ont été évaluées plus dangereuses qu'utiles (cotées "Pas d'accord").
Progrès majeurs apportés par deux vaccins covid-19, et par un médicament utilisé dans la porphyrie hépatique aiguë
En 2021, deux vaccins développés dans l'urgence de la pandémie de covid-19 ont constitué un progrès important. Il s'agit des vaccins à ARN messager : le tozinaméran et l'élasoméran. Dans un tout autre domaine, le givosiran, un ARN dit interférent, a apporté un progrès important chez les patients atteints de porphyrie hépatique aiguë, par son efficacité élevée sur la fréquence des crises, au moins à court terme.
Progrès notables apportés par des nouveautés concernant le plus souvent des substances déjà connues
Parmi les 14 nouveautés représentant un progrès notable pour les soins figurent les 2 vaccins covid-19 à vecteur viral autorisés dans l'Union européenne : le vaccin covid-19 Ad26.CoV2-S et le vaccin covid-19 ChAdOx1-S.
Les autres progrès concernent en majorité des médicaments déjà connus voire anciens, autorisés soit dans une autre indication, tel le rituximab dans le pemphigus vulgaire ; soit sous une autre forme pharmaceutique, tel le budésonide en comprimés orodispersibles dans les œsophagites à éosinophiles ; ou avec un nouveau dosage, telle la naloxone par voie nasale ; ou encore avec une nouvelle voie d'administration, tel le glucagon pour pulvérisation nasale. Chez les enfants, trois antiviraux utilisés dans l'hépatite C, déjà autorisés chez les adultes, ont apporté un progrès notable : le sofosbuvir seul, l'association sofosbuvir + lédipasvir, et l'association sofosbuvir + velpatasvir.
Retour de la fenfluramine et arrivée d'un nouveau médicament amphétaminique : à écarter des soins
En 2021 en France, le tribunal a rendu son jugement dans le procès pénal relatif au désastre du Mediator°, à base de benfluorex, un amphétaminique proche de la fenfluramine. La firme Servier commercialisant le benfluorex et l'Agence française du médicament ont été condamnées. Pourtant cette même année, la fenfluramine fait son retour sur le marché, cette fois dans le syndrome de Dravet, une forme rare et grave d'épilepsie infantile. Un nouveau médicament amphétaminique a par ailleurs été autorisé dans l'Union européenne : le solriamfétol dans certaines somnolences diurnes excessives. Dans ces situations cliniques, la balance bénéfices-risques de ces deux substances est défavorable, en raison du peu d'efficacité démontré, en regard des risques inhérents aux amphétaminiques, notamment cardiovasculaires.
En somme
En 2021, trois nouveaux médicaments, tous basés sur des techniques d'ARN messager ou d'ARN interférent, apportent un progrès important. Mais il s'agit de l'arbre qui cache la forêt dans la mesure où, par ailleurs, les nouveautés qui apportent un progrès concernent principalement des adaptations de médicaments déjà connus. Et dans la mesure où plus de la moitié des nouveautés n'apportent pas de progrès pour les soins et où environ 1 nouveauté sur 10 constitue une régression thérapeutique.
10 ans de cotations des nouvelles spécialités ou indications dans Prescrire

INTÉRESSANT
vaccins covid-19 à ARNm tozinaméran (Comirnaty°) et élasoméran (Spikevax°) dans la prévention de la maladie covid-19 chez les adultes (n° 450).
givosiran (Givlaari°) dans la porphyrie hépatique aiguë (n° 450).
APPORTE QUELQUE CHOSE
atézolizumab (Tecentriq°) associé au bévacizumab dans certains carcinomes hépatocellulaires (n° 457).
avélumab (Bavencio°) dans le carcinome urothélial (n° 456).
budésonide (Jorveza°) dans les œsophagites à éosinophiles (n° 455).
éculizumab (Soliris°) dans la maladie du spectre de la neuromyélite optique (n° 452).
glucagon (Baqsimi°) dans les hypoglycémies avec perte de conscience (n° 455).
ivacaftor + tézacaftor + élexacaftor (Kaftrio°) dans les mucoviscidoses avec au moins une mutation delta F508 (n° 458).
naloxone (Nyxoid°) dans les surdoses d'opioïdes (n° 457).
rituximab (Mabthera° ou autre) dans le pemphigus vulgaire (n° 448).
rituximab (Mabthera° ou autre) dans les polyangéites sévères chez les enfants (n° 456).
sofosbuvir (Sovaldi°), sofosbuvir + lédipasvir (Harvoni°) dans les hépatites C chroniques chez les enfants dès 3 ans (n° 457).
sofosbuvir + velpatasvir (Epclusa°) dans les hépatites C chroniques chez les enfants dès 6 ans et chez les adolescents (n° 457).
vaccin covid-19 à ARNm tozinaméran (Comirnaty°) dans la prévention de la maladie covid-19 chez les adolescents (n° 455).
vaccin covid-19 Ad26.CoV2-S à vecteur viral (Covid-19 Vaccine Janssen°) dans la prévention de la maladie covid-19 chez les adultes (n° 453).
vaccin covid-19 ChAdOx1-S à vecteur viral (Vaxzevria°) dans la prévention de la maladie covid-19 chez les adultes (n° 452).
ÉVENTUELLEMENT UTILE
apalutamide (Erleada°) dans le cancer de la prostate métastasé hormonosensible (n° 451).
apomorphine (Apokinon°) dans la maladie de Parkinson (n° 448).
atézolizumab (Tecentriq°) dans le cancer bronchique à petites cellules (n° 447).
brimonidine (Brimazed°) dans le glaucome (n° 454).
cabotégravir (Vocabria°) associé avec la rilpivirine (Rekambys°) dans l'infection à HIV (n° 458).
ciclosporine collyre (Verkazia°) dans la kératoconjonctivite vernale sévère (n° 449).
dapagliflozine (Forxiga°) dans l'insuffisance cardiaque chronique (n° 456).
docétaxel (Taxotère° ou autre) dans le cancer de la prostate métastasé hormonosensible (n° 454).
encorafénib (Braftovi°) dans les cancers colorectaux métastasés avec mutation BRAF V600E (n° 455).
énoxaparine 12 000 et 15 000 unités anti-Xa (Lovenox°) (n° 454).
érénumab (Aimovig°) dans la prévention des crises de migraine (n° 453).
étravirine (Intelence°) dans l'infection à HIV chez les enfants âgés de 2 ans à 6 ans (n° 454).
giltéritinib (Xospata°) dans les leucémies aiguës myéloïdes avec mutation du gène FLT3 (n° 448).
isatuximab (Sarclisa°) dans les myélomes multiples (n° 450).
lidocaïne (Ophtesic°) dans l'anesthésie locale durant les procédures ophtalmiques (n° 455).
rituximab (Mabthera° ou autre) dans les lymphomes non hodgkiniens chez les enfants (n° 454).
sévélamer en sachets à 0,8 g (Renvela°) dans les hyperphosphorémies (n° 452).
somatropine (Norditropine Flexpro°) dans les syndromes de Noonan (n° 456).
toxine botulique de type A (Botox°) dans l'incontinence urinaire liée à une sclérose en plaques avec miction conservée (n° 451).
LA RÉDACTION NE PEUT SE PRONONCER
avapritinib (Ayvakyt°) dans certaines tumeurs stromales digestives (n° 454).
bélantamab mafodotine (Blenrep°) dans les myélomes multiples après échec de plusieurs chimiothérapies (n° 453).
brentuximab védotine (Adcetris°) dans les lymphomes anaplasiques à grandes cellules systémiques en première ligne (n° 454).
brexucabtagène autoleucel (Tecartus°) dans certains lymphomes du manteau (n° 456).
bulévirtide (Hepcludex°) dans l'hépatite D chronique (n° 453).
burosumab (Crysvita°) dans les hypophosphatémies liées à l'X chez les adultes (n° 458).
céfidérocol (Fetcroja°) dans les infections aérobies à gram négatif (n° 458).
larotrectinib (Vitrakvi°) dans des cancers avec fusion d'un gène NTRK (n° 448).
lumasiran (Oxlumo°) dans les hyperoxaluries primitives de type 1 (n° 457).
olaparib (Lynparza°) dans les cancers de l'ovaire en association avec le bévucizumab (n° 457).
onasemnogène abéparvovec (Zolgensma°) dans l'amyotrophie spinale proximale (n° 454).
plérixafor (Mozobil°) dans la mobilisation de cellules souches en vue d'une greffe chez les enfants (n° 448).
PAS D'ACCORD
acide fusidique + bétaméthasone (Dermafusone°) dans l'eczéma atopique infecté (n° 451).
atézolizumab (Tecentriq°) dans le cancer du sein triple négatif inopérable ou métastasé (n° 447).
fenfluramine (Fintepla°) dans le syndrome de Dravet (n° 456).
nintédanib (Ofev°) dans les pneumopathies interstitielles en lien avec une sclérodermie systémique (n° 454).
nintédanib (Ofev°) dans diverses fibroses pulmonaires (n° 458).
olaparib (Lynparza°) dans le cancer du pancréas métastasé (n° 453).
omalizumab (Xolair°) dans la polypose nasale (n° 454).
siponimod (Mayzent°) dans les scléroses en plaques secondairement progressives (n° 451).
solriamfétol (Sunosi°) dans les somnolences liées à une narcolepsie ou à une apnée du sommeil (n° 451).
Progrès de l'année 2021 Comparaison aux 9 années précédentes