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"Décongestionnants" ORL : trop risqués en France aussi

Des patients, dont des enfants, restent exposés à des risques graves pour des affections bénignes tant que ces spécialités sont autorisées.

• En mai 2008, l'Agence française des produits de santé (Afssaps) a rendu accessibles les résultats d'une enquête de pharmacovigilance réalisée par le Centre régional de pharmacovigilance de Toulouse portant sur les effets indésirables cardiovasculaires et neurologiques des décongestionnants vasoconstricteurs notifiés en France (1).

• Les spécialités orales concernées contiennent de l'éphédrine, de la pseudoéphédrine, ou de la phényléphrine, et celles à usage nasal contiennent de la naphazoline, de l'oxymétazoline, de la tymazoline, de l'éphédrine, de la phényléphrine, ou du tuaminoheptane. Les médicaments à base de phénylpropanolamine ont aussi été analysés.

• Troubles du rythme, hypertensions artérielles, infarctus, etc. 206 observations comportant 296 troubles cardiaques, notifiées depuis la commercialisation des spécialités jusqu'en 2007, ont été analysées.
L'âge moyen des patients était de 39,6 ans. 16 patients avaient moins de 15 ans, dont 14 enfants de moins de 6 ans. Les effets indésirables ont concerné environ deux fois plus la voie orale que la voie nasale. 43 % des cas étaient graves. 3 patients sont morts.

• Les effets indésirables les plus fréquents ont été des hypertensions artérielles (33 %) et des tachycardies (16 %). Ont été rapportés aussi des palpitations, des bradycardies, des fibrillations auriculaires, des extrasystoles, des torsades de pointes et fibrillations ventriculaires, des blocs auriculoventriculaires, etc.
8 cas d'infarctus du myocarde ont concerné des patients jeunes, d'âge moyen 34 ans. 4 de ces patients n'avaient pas de facteur de risque cardiovasculaire connu et ont souffert d'un infarctus après la prise de Rhinadvil° ou de Nurofen Rhume° contenant, entre autres, de la pseudoéphédrine. Une coronarographie a été réalisée dans 6 cas, et 5 fois les coronaires sont apparues saines. 10 observations de douleurs angineuses ont aussi été rapportées.

• Accidents vasculaires cérébraux ischémiques et hémorragies cérébrales. 46 observations comportant 47 troubles neurologiques centraux notifiées entre 2001 et 2007 ont été analysées. L'âge moyen des patients, dont 5 enfants, était de 42,2 ans. 93,5 % des cas étaient graves. 2 patients sont morts. Les effets indésirables ont concerné environ deux fois plus la voie orale que la voie nasale.
Parmi les cas graves, on compte 13 accidents vasculaires cérébraux ischémiques et 5 hémorragies cérébrales, dont 2 décès. 5 patients ont gardé des séquelles.

• Des experts beaucoup trop peu exigeants. La conclusion du rapporteur de l'enquête devant la commission nationale du 25 mars 2008 a été que « ces effets graves sont peu acceptables et à mettre en balance avec l'aspect bénin de la pathologie traitée ».
Néanmoins, la commission s'est prononcée contre l'opportunité de rendre les décongestionnants accessibles uniquement sur prescription (liste II) : 12 voix contre, 2 pour et 12 abstentions.
Et pourtant, il était très simple de recommander fermement une mesure simple et efficace, au service des patients : le retrait du marché de ces spécialités.

• En pratique : bannir ces médicaments des pharmacies et des conseils. En France, les spécialités commercialisées pour les symptômes de la toux et du rhume sont très nombreuses. Elles contiennent souvent sous des noms de fantaisie non évocateurs, de multiples substances associées dont des décongestionnants et des antihistaminiques H1. Des contre-indications liées à l'âge encadrent les décongestionnants vasoconstricteurs, mais de nombreuses prescriptions sont néanmoins réalisées (2).

©Prescrire 15 octobre 2009

"Décongestionnants ORL : trop risqués en France aussi" Rev Prescrire 2009 ; 29 (312) : 752. (pdf, réservé aux abonnés)

Références :
1- Afssaps "Commission nationale de pharmacovigilance. Compte rendu de la réunion du mardi 25 mars 2008" 20 mai 2008. Site afssaps.sante.fr consulté le 3 août 2008 : 5 pages.
2- Prescrire Rédaction "Prescriptions dangereuses à des enfants" Rev Prescrire 2008 ; 28 (294) : 270.

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Pour en savoir plus :

Médicaments de la toux et du rhume
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