prescrire.org > Libre Accès > Faire progresser les politiques de santé > Pharmacovigilance > Toutes les actions > Propositions de la Commission européenne : déstructurantes (6/2009)

Faire progresser les politiques de santé

Pharmacovigilance

Pharmacovigilance : Toutes les actions
Propositions de la Commission européenne relatives à la pharmacovigilance : déstructurantes (Juin 2009)

Position conjointe de l' AIM, d'ESIP, de HAI Europe, du MiEF et de l'ISDB
Bruxelles, Juin 2009

Résumé :

En décembre 2008, la Commission européenne a publié des propositions de Règlement et de Directive concernant la pharmacovigilance. Malgré les récents désastres de santé publique, plusieurs mesures proposées sont de nature à affaiblir le système de pharmacovigilance européen, au lieu de le renforcer :

  • plutôt que de renforcer l’évaluation après mise sur le marché pour tous les médicaments grâce au renforcement des systèmes nationaux et régionaux indépendants de pharmacovigilance, il est prévu le recours accru à des “plans de gestion du risque”, dont l’expérience révèle qu’ils servent souvent de caution pour alléger dangereusement les évaluations avant autorisation de mise sur le marché ;
     
  • fin de l’obligation de financement public des activités de pharmacovigilance, réduisant les systèmes de pharmacovigilance des États membres au rang de prestataires au service des firmes pharmaceutiques, alors que les firmes ont justement intérêt à retarder la diffusion des données de pharmacovigilance ;
     
  • renforcement de la mainmise des firmes pharmaceutiques sur le recueil, l’analyse et l’interprétation des données, court-circuitant les systèmes de pharmacovigilance publics des États membres, privant la collectivité de l’expertise de ces systèmes et au risque d’entraîner leur disparition à moyen terme ;
     
  • formalisation d’un Comité européen consultatif de gestion des risques (PRAAC) sans autorité ni autonomie, et dont les moyens d’action sont insuffisants ;
     
  • organisation de la dilution des données de pharmacovigilance, stockées directement dans une “méga-base” électronique, Eudravigilance, privant les experts indépendants des systèmes de pharmacovigilance de proximité d’informations indispensables à l’analyse fine des notifications ;
     
  • maintien de l’opacité sur les données de pharmacovigilance (par exemple, pas d’accès aux rapports périodiques actualisés de sécurité (PSURs)), sous prétexte de “confidentialité commerciale”, alors qu’il s’agit de données scientifiques, appartenant au bien public, sur les effets indésirables subis par les patients.
     

Pour améliorer la sécurité des citoyens européens, les priorités sont de :

  • les protéger de l’exposition aux effets indésirables des médicaments qui n’apportent pas de progrès thérapeutique, en exigeant la démonstration d’un tel progrès comparativement aux traitements existants comme critère pour obtenir une autorisation de mise sur le marché ;
     
  • garantir le financement public du Comité européen de pharmacovigilance et des systèmes nationaux et régionaux de pharmacovigilance des États membres, afin de leur garantir les moyens d’assumer, en toute indépendance, leurs responsabilités de protection des populations. L’efficacité de leurs travaux se traduira par des décisions plus réactives (par exemple, meilleur encadrement ou retrait du marché des médicaments dont la balance bénéfices-risques s’avère être défavorable), donc par des économies importantes liées à la diminution du nombre des hospitalisations, arrêts de travail, et consultations médicales dus aux effets indésirables de médicaments ;
     
  • développer l’indépendance intellectuelle des autorités sanitaires par rapport aux firmes, grâce à une gestion plus stricte des conflits d’intérêts et en limitant l’influence des standards biaisés de l’International Conference on Harmonisation (ICH) ;
     
  • redéfinir le PRAAC comme un Comité européen de pharmacovigilance, qui soit un organe de coopération entre les systèmes de pharmacovigilance des États membres, et qui ait l’autorité suffisante pour proposer directement à la Commission européenne les modifications des notices ou le retrait du marché des médicaments dont la balance bénéficesrisques est défavorable ;
     
  • organiser un recueil public européen des notifications des effets indésirables de qualité (par exemple sous la forme d’une base de données telle qu’Eudravigilance), exclusivement alimenté par les systèmes de pharmacovigilance des États membres afin de bénéficier de leur expertise, dont les données doivent être rendues accessibles à l’ensemble des citoyens européens sous un format exploitable ;
     
  • responsabiliser les autorités sanitaires concernant l’exploitation efficace des données de pharmacovigilance européennes (améliorer le retour d’information vers les déclarants, améliorer la réactivité des prises de décisions devant permettre de protéger les citoyens, etc.) ; améliorer la transparence des activités de pharmacovigilance.

À condition d’être fortement amendées, les propositions de la Commission européenne concernant la pharmacovigilance peuvent être réorientées au service de l’intérêt général. 

> Télécharger la position conjointe de l' AIM, d'ESIP, de HAI Europe, du MiEF et de l'ISDB (pdf, 272 Ko)

©Collectif Europe et Médicament 2009