Revue Prescrire, article en une, Europe et médicament janvier 2003 (6)
Prescrire     Accueil  
 
Article en Une - Archive
Europe et médicament : les amendements repoussés par la Commission européenne
 
La Commission repousse plus de 50 amendements, dont certains sont essentiels à l'intérêt des patients. Son argumentation est souvent inconsistante et parfois tendancieuse.
Pour en savoir plus
 


Europe et médicament : les points -clés de la campagne
Cliquez ici

Amendements acceptés en principe...mais repoussés en pratique
Cliquez ici

Amendements acceptés et inclus dans la nouvelle proposition
Cliquez ici

Amendements acceptés sur le principe
Cliquez ici

Pour télécharger l'analyse linéaire de la nouvelle proposition de la Commission
analyse.zip

Visibilité du fonctionnement de l'Agence

Points négatifs
La Commission n'accepte pas que la banque de données sur les médicaments dont l'Agence européenne du médicament sera responsable permette des comparaisons entre médicaments (amendement 91 - article 51-1-2-j). Elle indique seulement que « la banque de données contiendra les informations (…) propres à chaque médicament sur la base desquelles une comparaison sera éventuellement possible ».
La Commission rejette l'autre partie de cet amendement qui concerne l'indépendance du financement de cette banque de données, et précise : « il ne peut pas être exclu que les firmes pharmaceutiques ne contribuent pas financièrement au développement de cette banque de données ».

Fonctionnement de l'Agence

Points négatifs
La Commission refuse la participation des patients au Conseil consultatif de l'Agence européenne du médicament (amendement 119 - article 59-1).
Elle refuse l'amendement visant à assurer le financement public des "tâches centrales" de l'Agence (amendement 152 - considérant 17bis). La Commission estime que « les redevances [NDLR : payées par les firmes] doivent servir à payer les services rendus à l'industrie : la contribution communautaire doit servir pour financer les taches de nature publique demandées à l'Agence par le législateur (…) ». Ce dernier argument résume la logique de la DGE de la Commission : l'autorisation de mise sur le marché des médicament est un service rendu aux firmes et non une tâche de nature publique.

Évaluation des médicaments

Point plutôt positif
La Commission estime que les recours à l'encontre des avis des commissions de l'Agence doivent être possibles uniquement sur la base de données déjà évaluées, et que si de nouvelles données apparaissent, elles doivent faire l'objet d'une nouvelle évaluation complète, ce qui paraît sage et s'oppose à l'amendement 107 - article 55-1-2 (a).

Points très négatifs
La Commission n'accepte pas l'amendement sur « l'obligation d'assortir la demande d'autorisation [NDLR : de mise sur le marché] d'une comparaison avec les médicaments existants pour les mêmes indications. La comparaison de l'efficacité d'un médicament ne peut pas être considérée comme un critère pour l'autorisation ». Il est choquant de voir bâcler un point aussi important avec une telle désinvolture, et ce d'autant plus que l'amendement 25 concerné (article 6-1-2), sans doute déjà bien malmené avant le vote du Parlement, ne prévoit même pas de rendre obligatoire un niveau d'exigence minimum. Il stipule seulement : « …) la demande peut être assortie, dans le rapport d'expert, d'une comparaison entre les nouveaux médicaments et les médicaments précédemment autorisés pour les mêmes indications (…) ».
Lla Commission repousse les amendements qui prévoient un délai minimum de 90 jours pour l'évaluation scientifique du dossier de demande d'AMM dans le cadre de la procédure normale, et l'allongement possible de ce délai dans des cas particuliers (amendements 175 et 45 - articles 6-3-1bis, 1ter, 1quater et article 13-6-2bis, 2ter). La Commission considère qu'il s'agit de « détails » relevant des procédures internes de la commission. Il s'agit pourtant de garanties essentielles à la qualité de l'évaluation.

Pharmacovigilance

Point positif
La Commission rejette l'amendement prévoyant d'obliger les firmes à contribuer au financement des activités de pharmacovigilance de l'Agence (amendement 67 - article 25ter nouveau) ; ce qui est favorable à un peu d'indépendance de l'Agence, au moins dans ce domaine très sensible.

Points négatifs
La Commission refuse que soit portée obligatoirement la mention « médicament nouvellement autorisé, prière de signaler les effets indésirables » sur la notice des médicaments nouveaux pendant cinq ans (amendement 42 - article 13-3bis), sous le faux prétexte qu'elle refuse par ailleurs que les patients notifient des effets indésirables directement aux firmes, mais seulement aux Agences et aux professionnels de santé (lire plus loin).
La commission refuse que la base de données de l'Agence contienne des informations de pharmacovigilance (amendement 157 - article 51-2) au prétexte qu'il est prévu une base de données spécifique de pharmacovigilance. On trouve ici l'explication à l'"oubli" de la pharmacovigilance dans l'amendement 95 prétendument accepté par la Commission (lire plus loin). Et encore une fois la Commission exprime son attachement à un système hétérogène difficile à appréhender par le public.

Usage compassionnel

Point plutôt positif
La Commission rejette un amendement qui prévoit que les médicaments utilisés au titre de l'usage compassionnel soient financés par les firmes (amendement 133 - article 73-6) et elle estime qu'il ne peut être exclu que le financement soit public. Il sera bon toutefois que le texte devienne plus précis sur ce point pour apporter plus de garanties aux patients.

Protection des données

Point négatif
La Commission repousse un amendement qui prévoit que les États membres puissent échapper à la généralisation de la protection des données sur les médicaments d'une durée de 10 ans (certains États les protègent seulement 6 ans actuellement) (amendement 46 - article 13-8).

Pays en développement

Points navrants
La Commission repousse tous les amendements visant à prévoir une solidarité active avec les pays démunis : exportation de seuls médicaments efficaces, sûrs et d'une qualité irréprochable ; incitation à la recherche pour les maladies des pays les plus démunis ; coopération dans le domaine pharmaceutique ; etc. (amendements 7, 8, 26, 94). La Commission estime que de telles propositions n'entrent pas dans le champ du projet de Règlement.

©La revue Prescrire 15 janvier 2003
_________
Note
a- Sur l'ensemble des amendements adoptés par les députés, certains inspirés plutôt par les lobbies industriels, ne défendaient pas la santé publique et les patients. Cela explique que nous avons jugé positifs certains rejets d'amendements.