Amnésie ?

Depuis 2015, un médicament associant la bupropione et la naltrexone est autorisé dans l'Union européenne chez des patients en situation de surpoids ou d'obésité. Il est commercialisé par exemple en Belgique, sous le nom de Mysimba°, mais pas en France. La dénomination commune internationale (DCI) initiale de la bupropione, choisie par l'Organisation mondiale de la santé (OMS), était "amfébutamone", ce qui mettait en évidence sa parenté chimique avec les amphétaminiques.

Les données d'évaluation soumises lors de la demande d'autorisation de mise sur le marché (AMM) de Mysimba° montraient une efficacité modeste sur la perte de poids, sans preuve d'une réduction des complications cliniques de l'obésité. Et rapportaient aussi des événements indésirables cardiovasculaires tels qu'infarctus du myocarde et augmentations de la pression artérielle, cohérents avec le profil d'effets indésirables des amphétaminiques. En somme, une AMM injustifiée et imprudente. En 2015, les autorités de santé européennes se sont contentées de demander à la firme de conduire un essai clinique pour évaluer les effets indésirables cardiovasculaires à long terme de ce médicament. En 2025, soit dix ans plus tard, la firme n'a toujours pas fourni de résultats ! Et rien n'est sur le point d'arriver, car ces autorités de santé lui accordent un délai supplémentaire, jusqu'en 2028 (lire aussi "Bupropione + naltrexone (Mysimba°) et excès de poids : maintien de l'AMM européenne au détriment des patients"). Pendant tout ce temps, des patients continueront à subir les effets indésirables graves voire mortels de ce médicament.

Cette posture attentiste rappelle de très mauvais souvenirs : quand l'Agence française du médicament proposait, au milieu des années 2000, de mettre en route de nouvelles études pour évaluer les effets indésirables du benfluorex (ex-Mediator°), au lieu de le retirer du marché sur la base des connaissances pharmacologiques et des notifications spontanées. Qu'est-ce qui empêche l'Agence européenne du médicament (EMA) de tirer pleinement les enseignements de ce désastre, et de servir en priorité l'intérêt des patients, en demandant le retrait du marché de ce coupe-faim ?

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