Selon un communiqué de l'Organisation mondiale de la santé (OMS) daté du 27 octobre 2022, la tuberculose a touché en 2021 près de onze millions de personnes dans le monde, dont environ un million d'enfants. Plus d'un million et demi de personnes en sont mortes. Cette année-là, la tuberculose a été la deuxième cause de mortalité due à une maladie infectieuse, derrière le covid-19, mais devant le sida. La plupart des personnes atteintes de tuberculose vivent dans des régions ou des quartiers "pauvres".
La tuberculose est d'autant plus grave qu'il existe des formes multirésistantes. C'est-à-dire résistantes aux antibiotiques de référence qui ont contribué à éviter de nombreuses morts par tuberculose.
C'est aussi une maladie dite négligée. C'est-à-dire une maladie contre laquelle les efforts de recherche et de développement de produits et technologies de santé sont insuffisants. Par exemple, en 2017, pour l'ensemble des maladies négligées, outre la tuberculose, seuls 3,5 milliards de dollars ont été investis en recherche et développement. À comparer à un total mondial de l'ordre de 150 milliards de dollars dépensés par les firmes pharmaceutiques en recherche et développement (lire aussi "Maladies encore négligées" n° 430 p. 627).
Pour faire face à la tuberculose et réduire le nombre de personnes qui en meurent, des antibiotiques plus utiles que dangereux sont nécessaires. Mais, début 2023, on manque de réels progrès thérapeutiques dans ce domaine. Le délamanid (Deltyba°) était déjà autorisé chez les adultes sans preuve solide d'efficacité bactériologique ni d'effet sur la mortalité (lire aussi "Tuberculose pulmonaire multirésistante et délamanid
" n° 452 p. 453). Il est devenu aussi autorisé chez les enfants et les adolescents. Chez ces jeunes patients aussi, l'évaluation est médiocre. Les principes de base d'une évaluation probante, à même de démontrer un progrès, ont encore été négligés. Négligés par la firme qui n'a pas fourni d'essai clinique pertinent. Négligés par les autorités du médicament qui autorisent ce médicament sans preuve solide d'efficacité clinique alors qu'il expose les enfants concernés à des effets indésirables graves.
En janvier 2020, alors que la France recensait trois premiers cas de covid-19, certains affirmaient que cette affection ne concernait qu'un pays lointain, la Chine. Faudra-t-il attendre qu'une épidémie mondiale de tuberculose multirésistante frappe à la porte des pays "riches" pour que l'on cesse de négliger les personnes qui en meurent, où que ce soit dans le monde ?