Indépendance. Un mot souvent galvaudé, y compris dans le domaine de la santé. En 2022 encore, des soignants et des formateurs mettent en avant leur indépendance, alors qu'ils suivent ou dispensent leur formation aux frais d'acteurs ayant des intérêts commerciaux ou financiers. Ils arguent par exemple que ce financement n'empêcherait en rien leur indépendance intellectuelle et n'induirait aucune autocensure, ou que multiplier les financeurs neutraliserait leurs influences, ou que le financement de la formation par un organisme public tel que l'assurance maladie serait sans aucun risque d'influence. Des associations de patients aussi tiennent ce type de raisonnement.
Se dire indépendant ne suffit pas à être crédible. Et prendre conscience de sa vulnérabilité aux influences aide à être moins influençable. Quand on veut agir sur la durée et que cela nécessite des moyens financiers, on est forcément dépendant… de qui finance. Cela oblige à choisir ses dépendances. C'est ainsi que l'équipe Prescrire a choisi de dépendre uniquement de professionnels visant à améliorer les soins au bénéfice premier des patients : les abonnés. En mettant en place l'organisation nécessaire, avec notamment : un statut d'association à but non lucratif dont l'Assemblée générale fonctionne par collèges (abonnés, rédacteurs, conseillers et fondateurs) ; des budgets importants de documentation ; une procédure d'élaboration rédactionnelle collective et réfléchie pour se préserver d'opinions individuelles ou de positions d'école, avec traçabilité et transparence ; une déclaration annuelle d'absence de conflit d'intérêts de la part de chaque membre de la Rédaction et de l'équipe dirigeante.
Transparence. Un autre mot aujourd'hui galvaudé tant il cache souvent une part d'opacité. Pour l'Association Mieux Prescrire, qui édite les productions Prescrire, la transparence va jusqu'à la publication annuelle de son budget, où apparaissent les principaux secteurs d'utilisation des fonds confiés par les abonnés (lire "Les finances de l'Association Mieux Prescrire : bilan de l'exercice 2020-2021"). Ce n'est pas si courant.
Depuis deux décennies, le domaine de la santé, en France et ailleurs, a vu des avancées vers des choix de dépendance financière et de transparence compatibles avec une information et une formation fiables : actions d'associations et de syndicats étudiants, pour que leur formation soit indépendante d'acteurs dont la priorité n'est pas la qualité des soins ; charte éthique endossée par les conférences des doyens des facultés de médecine et d'odontologie ; refus d'associations de soignants et de patients de dépendre de financements de firmes de santé ; etc.
Comme toujours, Prescrire entend contribuer à ces avancées.