Envisager la prescription en DCI, c'est l'occasion pour
chacun de réfléchir sur la connaissance réelle qu'il a des
médicaments, et donc sur la formation initiale et continue en pharmacologie
et en thérapeutique. C'est aussi un moyen d'améliorer les bonnes
pratiques de prescription et de dispensation. C'est mieux prendre en compte le
patient et respecter ses choix.
L'usage de la
DCI facilite l'usage des sources d'informations indépendantes
Une répartition efficace des tâches entre prescripteurs
et pharmaciens Un langage commun, en ville et
à l'hôpital, et pour la sécurité à l'étranger
Pour améliorer la communication soignants-patients
L'usage
de la DCI facilite l'usage des sources d'informations indépendantes Dans
toutes les sources d'information thérapeutique fiables et comparatives,
qu'il s'agisse de guides thérapeutiques, de recommandations, d'essais cliniques,
de méta-analyses, et ce quel que soit leur pays d'origine, les substances
sont désignées d'abord (et souvent uniquement) par leur DCI. Un
professionnel de santé qui ne connaîtrait pas les médicaments
par leur DCI ne pourrait pas sérieusement maintenir à jour ses connaissances.
Il faut pratiquer cet esperanto utile pour profiter des données
actualisées et non biaisées.
Une
répartition efficace des tâches entre prescripteurs et pharmaciens
Il revient au pharmacien de vérifier l'adéquation des prescriptions
(absence d'erreur, posologie, interactions avec des traitements concomitants,
etc.), puis d'expliquer ou de réexpliquer aux patients les modalités
de prise, les précautions d'emploi, afin d'aider chacun à intégrer
le traitement dans ses conditions de vie et de travail, etc. (article R. 4235-48
du CSP).
Mais des éléments d'information sont nécessaires.
C'est au prescripteur de les faire figurer sur l'ordonnance : à
propos du patient concerné : son nom et son sexe (ce n'est
pas toujours le malade qui viendra à la pharmacie), son âge et souvent
son poids (en particulier pour les enfants, les patients très maigres ou
obèses), voire sa surface corporelle dans certains cas ;
à
propos du médicament choisi : réalisée en DCI,
la prescription fait apparaître clairement et simplement, pour le pharmacien,
les autres soignants et le patient, avec quel(s) médicament(s) le traitement
va avoir lieu. L'ordonnance peut comporter une mention expliquant que le médecin
laisse au pharmacien et au patient le soin de choisir ensemble une spécialité
adaptée. Dans un pays encore habitué aux prescriptions en noms commerciaux,
la démarche peut être pédagogique. Si la prescription
est réalisée en nom commercial pour une raison médicalement
justifiable, et si la dispensation d'une autre marque n'est pas souhaitable, le
prescripteur doit ajouter la mention "non substituable". Le pharmacien
doit alors dispenser la spécialité prescrite (article R. 5125-54
du CSP), sauf si le pharmacien décèle dans l'ordonnance une erreur
ou une incohérence mettant en jeu " l'intérêt de la santé
du patient " (article R. 4235-61 du CSP). à
propos de la dose administrée et de la durée du traitement :
une fois la substance active choisie, le prescripteur peut se concentrer sur la
forme pharmaceutique et la posologie (la dose unitaire, le nombre de prises quotidiennes,
le moment de ces prises, ainsi que la durée du traitement). Et c'est
tout ! Il serait regrettable que le prescripteur se disperse à rechercher
quel est le nombre de gouttes par flacon de telle ou telle spécialité,
ou si telle spécialité existe en boîtes de 28 ou 30 comprimés,
alors qu'il n'a ni le temps, ni toujours les bons outils pour le faire. Le pharmacien,
lui, a toutes les données techniques sous la main pour assurer la dispensation
des quantités nécessaires et suffisantes. Prescrire en DCI conduit
le prescripteur à concentrer son attention sur la(ou les) substance(s)
qu'il veut prescrire, sur les bénéfices attendus et les effets indésirables
potentiels, sur les doses administrées et la durée de traitement.
Le pharmacien peut ensuite choisir la spécialité, en l'adaptant
au traitement envisagé et à la situation du patient, expliciter
les modalités d'utilisation, et s'assurer de leur bonne compréhension.
Dans tous les cas où elle est possible, la prescription en DCI permet au
pharmacien de limiter le nombre de spécialités similaires qu'il
stocke, à l'officine ou à l'hôpital. Il peut ainsi disposer
de stocks suffisants pour chaque substance, et éviter de faire attendre
ou revenir les patients. C'est une des raisons pratiques qui figurent dans le
guide thérapeutique britannique ("British National Formulary").
Un langage commun, en ville et à
l'hôpital, et pour la sécurité à l'étranger À
l'heure actuelle, au sein des hôpitaux français, beaucoup de prescriptions
se font soit en DCI, soit en noms commerciaux. In fine, le patient hospitalisé
reçoit un médicament à nom commercial (parfois différent
de celui qui a été prescrit) ou, plus rarement, une préparation
hospitalière. L'infirmière qui vient administrer les médicaments
les appelle parfois encore par d'autres noms commerciaux (par habitude ancienne
ou parce qu'elle utilise un certain nom commercial sur un autre lieu de travail).
Le même patient, revenu à son domicile, se voit en général
prescrire le même traitement, le plus souvent sous un nom commercial (parfois
différent de celui reçu à l'hôpital), et le médicament
qu'il reçoit du pharmacien d'officine peut encore porter un autre nom commercial
(en raison du droit de substitution). Tel parent ou tel ami de ce patient
prend le même médicament, mais sous un autre nom, ou un médicament
très différent sous un nom commercial qui ressemble. Dans l'armoire
à pharmacie familiale, il n'est pas rare que plusieurs boîtes contiennent
la même substance sous des noms commerciaux différents.
Si tout au long de la chaîne de soins un seul et même nom, la DCI,
était utilisé pour désigner le médicament, cela faciliterait
la compréhension et la communication entre les professionnels, mais aussi
les échanges avec les patients (pour peu que cette DCI soit " facilement
lisible, clairement compréhensible " sur les emballages des spécialités,
comme l'exige l'article R. 5121-138 du CSP). En cas de voyage à
l'étranger (situation de plus en plus fréquente pour les citoyens
de tous pays), il est important que les patients connaissent la DCI de leurs médicaments
(afin notamment de pouvoir, au besoin, s'en procurer sans difficulté).
C'est une des évidences qui ont conduit à la mise en place du programme
des DCI de l'OMS.
Pour améliorer
la communication soignants-patients L'objectif du prescripteur est d'être
compris, non seulement par le pharmacien et les autres soignants, mais surtout
par le patient. S'il fait en sorte, notamment grâce à la
DCI, d'être moins préoccupé par les noms commerciaux ou les
prix des spécialités, le prescripteur pourra véritablement
commenter sa prescription avec le patient. Document de communication,
l'ordonnance claire et intelligente n'est ni un simple bon de commande conforme
au règlement, ni un banal outil comptable pour l'assurance maladie.
Rappeler ces principes de base est utile, car à force de se focaliser
sur une réglementation de plus en plus complexe, d'agir en prestataire
de service manipulé par les firmes pharmaceutiques ou l'assurance maladie,
de consacrer du temps à la technique informatique, et d'accepter comme
guides thérapeutiques des slogans publicitaires, on en vient à oublier
le patient.
Il est facile de dire à tous les patients demandeurs
d'information quelle est la DCI de la substance avec laquelle ils sont traités.
Ils peuvent ainsi la repérer dans d'autres spécialités (de
prescription, de conseil ou d'automédication), et éviter des prises
concomitantes, inutiles voire dangereuses. Les patients les plus curieux
peuvent s'intéresser aux suffixes qui permettent de reconnaître telle
ou telle famille de médicaments par leur DCI. Ils ne se contentent plus
d'un nom commercial, qui ne transmet qu'un message insuffisant. Une information
claire des patients est aussi une marque de respect. ©La
revue Prescrire 1er octobre 2005 |