Visibilité
du fonctionnement de l'Agence
- les membres des commissions et des conseils de l'Agence établiraient
chaque année la liste de leurs conflits d'intérêts.
Cette liste serait rendue publique, mais seulement sur demande,
aux bureaux de l'Agence (amendement 110 - article 56-2-1, 1bis et
2), ce qui rend l'obligation inopérante ;
- la Commission n'accepte pas que la banque de données sur
les médicaments, dont l'Agence européenne du médicament
sera responsable, permette des comparaisons entre médicaments
(amendement 91 - article 51-1-2-j) ;
- la plupart des amendements votés le 23 octobre 2002 par
le Parlement concernant la transparence de l'Agence européenne
du médicament (au sens de visibilité par le public
de son fonctionnement) font référence au Règlement
européen 1049/2001 sur l'accès aux documents et sur
les registres prévus dans ce texte pour archiver les documents
et permettre ainsi leur accès aisé par les citoyens
de l'Union (notamment amendements 38, 43, 51, 53, 79, 81, 87, 109,
131). La Commission affirme accepter ce principe de l'accès
aux documents, mais considère que, pour certains documents,
ils sont déjà accessibles et ne nécessitent
pas de nouvelle obligation (cas des rapports d'évaluation
de la Commission d'autorisation de mise sur le marché). Pour
d'autres, elle annonce que l'accès sera garanti par une "proposition
séparée de la Commission". Pour d'autres encore,
elle considère qu'il est inutile de regrouper les documents
dans des registres puisqu'ils seront déjà accessibles
dans une base de données séparée (cas des essais
cliniques, qui seraient ainsi séparés des données
de l'AMM par exemple). Pour d'autres enfin, elle envisage un accès
"hiérarchisé" selon que la requête
viendra d'une firme pharmaceutique, d'un professionnel de santé,
ou du public (cas des effets indésirables).
Il faut bannir cette multiplicité de voies d'accès
et faire appliquer le Règlement 1049/2001.
Fonctionnement
de l'Agence
- la Commission avait accepté le principe qu'un rapporteur
de dossier de demande d'AMM auprès de l'Agence sollicite
l'avis d'associations de patients, mais tandis que le Parlement
avait voulu cette consultation obligatoire, la Commission proposait
la formule « le rapporteur peut prendre contact »
(amendement 105 - article 55-1-1). Ce point n'a pas été
repris dans le compromis commission - conseil ;
- le Parlement a aussi voulu que les présidents des commissions
scientifiques de l'Agence européenne du médicament
participent aux réunions du Conseil d'administration de l'Agence.
La Commission rend cette participation facultative et non obligatoire
comme voté par les députés (amendement 118
- article 58-3) ;
- la Commission avait proposé dans son premier projet de
règlement que la procédure centralisée d'autorisation
de mise sur le marché (par l'agence européenne du
médicament donc) soit rendue obligatoire pour toute nouvelle
substance. Cette centralisation permettrait d'éviter le mécanisme
actuel de reconnaissance mutuelle qui semble souvent un moyen plus
facile et plus opaque d'obtenir une AMM que la procédure
centralisée. De nombreux pays restent hostiles à cette
proposition (point encore en discussion) ;
- des représentants des patients, des médecins et
des organismes de sécurité sociale siègeraient
au Conseil d'administration de l'Agence (amendements 116, 117 -
article 58-1 et 2). Ce point est cependant encore en discussion,
la France s'opposant à la présence des organismes
de sécurité sociale ;
- la Commission refuse la participation des patients au Conseil
consultatif de l'Agence européenne du médicament (amendement
119 - article 59-1) ;
- elle rejette la partie de l'amendement 91 (article 51-1-2-j) qui
concerne l'indépendance du financement de sa banque de données,
et précise: « il ne peut pas être exclu
que les firmes pharmaceutiques ne contribuent pas financièrement
au développement de cette banque de données » ;
- dans le même esprit, elle refuse l'amendement visant à
assurer le financement public des "tâches centrales"
de l'Agence (amendement 152 - considérant 17bis). La Commission
estime que « les redevances [NDLR : payées
par les firmes] doivent servir à payer les services rendus
à l'industrie : la contribution communautaire doit servir
pour financer les taches de nature publique demandées à
l'Agence par le législateur (
) ». Elle reconnaît
cependant la nécessité d'un financement public "adéquat"
pour les activités de pharmacovigilance, de surveillance
du marché (?) et de gestion des réseaux d'information
(?) (amendement 121, article 60) ;
- la commission d'autorisation de mise sur le marché (actuel
CPMP) comprendrait un seul membre représentant chaque État,
et non plus deux. Avec une telle disposition, on peut craindre que
la commission d'AMM soit constituée uniquement de représentants
administratifs des Agences nationales, alors qu'un binôme
permettrait d'avoir un membre plus administratif et un autre plus
scientifique. S'il s'agit de ne pas trop compliquer la tenue de
réunions dans une perspective d'élargissement de l'Union,
il peut être proposé de conserver deux représentants
par État, mais disposant d'une seule voix.
Évaluation
des médicaments
- la Commission rejète de fait un amendement qui stipule
que les avis de la commission d'autorisation de mise sur le marché
doivent être motivés indication (thérapeutique)
par indication, avec pour argument que cela se pratique déjà.
Inscrire dans un règlement qu'une pratique doit être
obligatoire est pourtant plus rassurant ;
- la Commission repousse les amendements qui prévoient un
délai minimum de 90 jours pour l'évaluation scientifique
du dossier de demande d'AMM dans le cadre de la procédure
normale, et l'allongement possible de ce délai dans des cas
particuliers (amendements 175 et 45 - articles 6-3-1bis, 1ter, 1quater
et article 13-6-2bis, 2ter). La Commission considère qu'il
s'agit de "détails" relevant des procédures
internes de la commission. Il s'agit pourtant de garanties essentielles
à la qualité de l'évaluation ;
- la Commission affirme accepter en principe les amendements faisant
référence au "principe de l'efficacité
relative" (d'un médicament par rapport aux autres moyens
thérapeutiques déjà disponibles) (amendements
4 et 100 - considérant 11 et article 53bis). Elle rappelle
même que le Conseil des ministres européens de la santé
a souligné (depuis le 29 juin 2000) l'importance d'une identification
des médicaments présentant une valeur thérapeutique
ajoutée.
Mais, selon la Commission, « cette évaluation
ne doit pas être conduite dans le cadre de l'autorisation
de mise sur le marché dont il convient de conserver les critères
fondamentaux », les seuls critères étant
pour elle : qualité, sécurité et efficacité
du nouveau médicament. Elle propose donc une simple enquête
sur les méthodes utilisées par les États membres
pour déterminer le progrès thérapeutique apporté
par un nouveau médicament, alors que ces méthodes
sont déjà connues et décrites depuis longtemps,
et sans dire à quoi pourrait servir cette enquête.
Le Collectif souhaite qu'il existe un système encourageant
les firmes à fournir des informations comparatives sur leurs
médicaments. Il demande qu'au minimum il soit officiellement
précisé, le cas échéant, que le dossier
de demande d'AMM ne comportait pas de telles données. Quel
que soit l'état du dossier, le rapport d'évaluation
de l'Agence doit donner l'avis de la Commission d'AMM sur la valeur
thérapeutique ajoutée par le médicament, ou
doit signaler l'impossibilité de la déterminer : simple
question de transparence sur l'état de l'évaluation.
Pharmacovigilance
- les patients seraient invités à notifier les effets
indésirables auprès des professionnels de santé ;
et peut-être aux autorités compétentes (amendement
54 - article 20-3). Ce point est cependant encore en discussion,
plusieurs pays dont la France ne souhaitant pas que les patients
notifient aux autorités compétentes ;
- la Commission refuse que soit portée obligatoirement la
mention « médicament nouvellement autorisé,
prière de signaler les effets indésirables »
sur la notice des médicaments nouveaux pendant cinq ans (amendement
42 - article 13-3bis), sous le prétexte qu'elle refuse par
ailleurs que les patients notifient des effets indésirables
directement aux firmes, mais seulement aux Agences et aux professionnels
de santé (lire plus haut). Cela n'a rien à voir avec
la nécessité d'appeler l'attention des patients sur
un suivi particulier des nouveaux médicaments. Il se pratique
déjà dans différents pays du monde, sans difficulté
particulière (Nouvelle-Zélande, Suède, Royaume-Uni) ;
- le Parlement avait voulu que l'Agence européenne du médicament
mette en place un recueil actif de données spécifiques
de pharmacovigilance pendant les deux premières années
de commercialisation des nouveaux médicaments ; la Commission
transforme cette obligation en simple possibilité, sur justificatif,
mais pour une durée de 5 ans (amendement 64 - article 24-3bis) ;
- la Commission refuse que la base de données de l'Agence
contienne des informations de pharmacovigilance (amendement 157
- article 51-2) au prétexte qu'il est prévu une base
de données spécifique de pharmacovigilance. Encore
une fois la Commission exprime son attachement à un système
hétérogène difficile d'accès par le
public.
Usage
compassionnel
- il reste prévu ( article 73-6) que les médicaments
en usage compassionnel soient gratuits pour les patients. Cet article
devra être précisé, faute de quoi firmes, agences
nationales et agence européenne risquent de se rejeter la
responsabilité du financement ;
- par ailleurs, le projet de Règlement n'apporte aucune garantie
sur le fait qu'un programme d'accès compassionnel soit mis
en place dans chaque cas où des patients en impasse thérapeutique
pourraient en bénéficier. Dans cet objectif, il est
nécessaire de prévoir que des représentants
de patients puissent saisir les agences européenne et nationales
de leurs demandes.
Protection
des données
- la Commission repousse un amendement qui prévoit que les
États membres puissent échapper à la généralisation
de la protection des données sur les médicaments d'une
durée de 10 ans (certains États les protègent
seulement 6 ans actuellement) (amendement 46 - article 13-8). Plusieurs
pays souhaitent voir ce point traité en même temps
que la disposition semblable du projet de Directive.
Pays
en développement
- la Commission repousse tous les amendements visant à prévoir
une solidarité active avec les pays démunis :
exportation de seuls médicaments efficaces, sûrs et
d'une qualité irréprochable ; incitation à
la recherche pour les maladies des pays les plus démunis ;
coopération dans le domaine pharmaceutique ; etc. (amendements
7, 8, 26, 94). La Commission estime que de telles propositions n'entrent
pas dans le champ du projet de Règlement. Le minimum serait
pourtant qu'ils figurent au moins dans les considérants du
texte, marquant ainsi la préoccupation de l'Europe pour un
sujet aussi important.
©La revue Prescrire pour le Collectif
Europe et Médicament 1er mars 2003
|