À l'occasion de l'extension d'autorisation de l'oséltamivir (Tamiflu°) dans la grippe saisonnière chez les enfants âgés de moins d'un an, sans preuve clinique de son intérêt, la revue Prescrire revient sur le succès mondial étonnant de ce médicament dont l'évaluation clinique est entachée de manipulations et se révèle très insuffisante.

La rétention de nombreuses informations par la firme et l'Agence européenne du médicament ont retardé une évaluation indépendante de ce médicament. Celle-ci a révélé que les arguments en faveur de l'oséltamivir reposent sur des données de faible niveau de preuves : données non comparatives, issues d'études d'observations.

En 2015, on sait toujours très peu de choses sur l'efficacité de l'oséltamivir pour prévenir les complications graves de la grippe chez des personnes à risque, notamment les personnes âgées : les essais cliniques financés par la firme n'ont pas cherché à le savoir.

Pendant ce temps, des effets indésirables graves continuent à être mis en évidence : troubles neuropsychiques, troubles cardiaques, réactions allergiques, troubles cutanés, hépatites fulminantes, saignements digestifs.

Malgré sa balance bénéfices-risques au mieux incertaine, l'oséltamivir continue d'être recommandé et fait même partie de la liste des médicaments essentiels établie par l'OMS, ce qui a permis au médicament d'être vendu en quantités impressionnantes.

Devant la complaisance des autorités et la rétention manifeste d'informations par la firme, ne pas recommander ni utiliser l'oséltamivir en traitement de la grippe évite d'exposer inutilement de nombreux patients à un médicament dont on ne sait pas à quoi il sert.

©Prescrire 1er novembre 2015

"Oséltamivir et grippe : toujours pas de données solides" Rev Prescrire 2015 ; 35 (385) : 871-875. (pdf, réservé aux abonnés)