Et si ?

Face à un symptôme ou à un ensemble de symptômes et de signes cliniques, il est habituel que les soignants de premier recours évoquent surtout des diagnostics appris à la faculté ou fréquemment rencontrés au cours de leur pratique. Le plus souvent, un entretien avec le patient et un examen clinique accompagnés (ou non) d'examens paracliniques courants suffisent à poser un diagnostic, à le rattacher à une cause parmi les plus évidentes et à construire une stratégie thérapeutique.

Mais pas toujours. Il arrive que la ou les causes envisagées n'expliquent pas tous les symptômes et que la réponse médicale proposée ne convienne pas, voire qu'elle aggrave la situation. Il arrive même que l'on n'ait aucune idée sur ce qui se passe. Il est alors courant de passer la main à un praticien spécialiste d'organe ou de système. Souvent, cela conduit à trouver la solution.

Mais parfois, "ça ne colle toujours pas". On ne sait pas ce qu'a le patient, ni pourquoi. On en vient à évoquer une origine psychique. On passe alors la main à un psychiatre ou à un psychologue. Cela rend service à certains patients. Mais pas à tous. Et certains se retrouvent catalogués avec une "étiquette" pénible à porter, parfois longtemps malgré des fondements fragiles.

Et parfois, rien de tout cela n'est vraiment satisfaisant.

Peut-être parce qu'aucun des intervenants n'a osé assez tôt sortir des sentiers battus, et évoquer des causes fréquentes mais souvent sous-estimées, peu enseignées et finalement négligées.

Et si c'était dû à un médicament ? À l'alcool, à une autre drogue, à tel ou tel complément alimentaire ? Et si c'était dû aux conditions de travail ; d'ailleurs, combien de temps a-t-on passé avec le patient à examiner ses conditions réelles de travail et les substances auxquelles il est exposé ? Et si c'était dû à un toxique environnemental ? Et si c'était dû aux conditions de logement ? À un aliment ? À un loisir ?

Avec parfois une réponse permettant de résoudre vraiment le problème, et non seulement de le pallier.

Se demander par principe "Et si ?", très tôt dans la démarche de soins, en sortant des chemins trop balisés par nos habitudes, et compléter cette question selon la situation clinique avant d'envisager des causes plus rares, ou des traitements plus pénibles, ou seulement symptomatiques : cela contribue à rendre service à de nombreux patients.

"Et si ?" : une question à ouvrir largement quand la gestion d'un problème de santé ne paraît pas d'emblée satisfaisante.

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