Notre société attend beaucoup des médicaments, pour résoudre tel ou tel problème de santé.
Mais les déceptions se multiplient. Choisir et dispenser un nouveau médicament signifie de moins en moins apporter un meilleur soin. Le processus d’innovation tourne à vide. Ainsi, pour la première fois depuis sa création en 1981, le Palmarès Prescrire ne compte pour 2008 ni Pilule d’Or ni inscription au Tableau d’Honneur. Les trois médicaments distingués malgré tout, plus modestement, sont à base de substances connues depuis des décennies. En parallèle, en 2008, 23 nouveautés ont été cotées “Pas d’accord’’ par Prescrire, un nombre jamais atteint depuis 1981.
Cette carence d’innovation met les firmes pharmaceutiques sous pression économique. Elles répercutent cette pression autour d’elles. Les prix des nouveaux médicaments restent élevés malgré la petitesse du service rendu. La médicamentation de l’existence est promue à outrance malgré ses dangers.
En 2008, la vente de certains médicaments directement au patient pour son “automédication’’ a été autorisée en France, sans passage obligé par le médecin ni par le pharmacien. Avec là aussi tout un lot de déceptions. La plupart de ces médicaments sont dépassés, et peu ou pas utiles aux soins, voire carrément nocifs. Plusieurs figurent au Palmarès Prescrire du conditionnement, mais seulement parmi les exemples à ne surtout pas suivre en termes de sécurité et d’information.
Que faire ?
Certes, il est utile de pousser sans relâche les autorités à faire leur travail d’encadrement des firmes, y compris dans leur activité de recherche (à centrer sur des questions cliniquement pertinentes et à fonder sur une pharmacologie solide). En sachant qu’une réorganisation mettra des années à porter ses fruits.
D’ici là, au quotidien, il s’agit de démystifier les nouveaux médicaments. De redécouvrir les médicaments essentiels toujours d’actualité. Et de saisir les occasions de remettre le médicament à sa place, avec modestie et ambition.
Avec modestie, tant le médicament est souvent accessoire dans la prévention et le traitement de nombreuses affections.
Avec ambition, tant lorsque le médicament est utile il y a intérêt à connaître sérieusement ses limites et à exploiter à fond ses qualités.
Les patients et les soignants travaillant en bonne intelligence et s’appuyant sur ces principes sont les mieux placés pour réussir.
©Prescrire 2012
Rev Prescrire 2012 ; 32 (340) : 84.
Tiré de : Rev Prescrire 2009 ; 29 (304) : 81.