Revue Prescrire, article en une, Juger les guides de la Haute autorité de santé (HAS) dans leur globalité, septembre 2008
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Juger les guides de la Haute autorité de santé (HAS)
dans leur globalité
   
Quand on prend un peu de recul sur les examens "Au crible" des guides de pratique clinique de la HAS, à l'été 2008, des pistes d’amélioration apparaissent.
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Juger les guides de la HAS dans leur globalité
Rev Prescrire 2008 ; 28 (299) : 706.
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HAS au crible
Rev Prescrire 2007 ; 28 (282) : 241.
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Liste des guides HAS passés "au crible "
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Les guides de pratique clinique sont des outils utiles aux soignants quand il s’agit de guides de qualité.
Depuis 2007, Prescrire passe "Au crible" chacun des guides que la Haute autorité de santé (HAS) publie en France. "Au crible" permet d’apprécier la qualité méthodologique du guide, la cohérence entre argumentaire et recommandations et le niveau de preuves des recommandations. L‘appréciation globale de Prescrire est présentée selon une échelle à 4 niveaux (se reporter au n° 282, pages 304-306 pour la description détaillée de la méthode de tri).
Ce tri vise à aider les abonnés à ne retenir que les guides solides, sans s’encombrer des autres.

Évaluer les guides sur leur cohérence globale

Pour chaque guide de pratique clinique, la HAS met habituellement en ligne trois documents téléchargeables : un document long d'une centaine de pages ("argumentaire"), un document plus court de quelques dizaines de pages qui présente les recommandations en détail ("recommandations") et un résumé de 1 à 4 pages, constitué de listes de points clés, de tableaux ou parfois d’arbres décisionnels ("fiche de synthèse").
Prescrire ne formule une appréciation que si ces 3 composantes sont disponibles. En 2008, c’est le cas pour pratiquement tous les guides dès leur mise en ligne.
Même si l’argumentaire est solide et intéressant, nous sommes amenés à conclure défavorablement lorsque les recommandations ou la fiche de synthèse sont imprécises ou en contradiction avec les données de l’argumentaire.
Un Guide de pratique clinique est un "totum", un "lot", un "pack", à lire ou à laisser. Les professionnels de santé n’ont guère le temps de retenir que dans tel guide, telle partie est bonne et le reste à jeter, alors que dans tel autre guide, c’est une autre partie qui peut être utile.

Ne pas se contenter de lire les "fiches de synthèse" sur support papier diffusées par la HAS

Lorsque la HAS décide de diffuser sur support papier l’un de ses guides auprès des soignants, c’est souvent la seule fiche de synthèse qui arrive dans leur boîte aux lettres.
Ce document, écrit dans un style télégraphique, se présente essentiellement comme un aide-mémoire. Nos analyses ont mis en évidence des défauts à ces fiches de synthèse. Ces fiches ne couvrent pas totalement les recommandations énoncées dans les autres documents. Elles explicitent rarement les niveaux de preuves et n’ont pas toujours la précision nécessaire à une mise en œuvre correcte des recommandations.
Plus préoccupant : il apparaît parfois des points non argumentés dans les documents plus longs, ou des messages en discordance avec les recommandations.
En pratique, la lecture attentive et critique des recommandations apparaît incontournable si l’on veut tirer profit des guides de la HAS de qualité. La lecture de l’argumentaire est souhaitable lorsque le guide est de bonne qualité ; mais souvent les professionnels de santé n’ont guère le temps à y consacrer. Par contre, la fiche de synthèse des guides de la HAS est au mieux un aide-mémoire, parfois trompeur.

Conflits d’intérêts : vers la transparence ?

Pour ce qui est des guides que nous avons passés "Au crible" jusqu'en septembre 2008, la composition des groupes de travail et de relecture des guides de la HAS ne reflète que très rarement l’ensemble des personnes concernées par les questions abordées. Les médecins spécialistes représentent presque toujours la majorité des médecins impliqués ; les pharmaciens, les infirmiers et les représentants d’associations de patients et d'usagers sont souvent absents. Ce défaut important peut être corrigé si la HAS se donne les moyens de sortir de l’hospitalocentrisme spécialisé.
L’indépendance des participants est un élément-clé de la qualité d’un guide. Elle ne peut être appréciée que si les organisateurs obtiennent une déclaration de liens d’intérêt de chaque participant. Les guides de la HAS que nous avons analysés initialement omettaient presque toujours de rapporter les déclarations d’intérêts. Puis, la mention « les participants ont fourni une déclaration d’intérêt » est apparue. Mais, en l’absence de publication de ces déclarations, rien ne permettait de dire si les participants avaient ou non des conflits d’intérêts.
Au printemps 2008, un site libre d’accès regroupe les déclarations d’intérêt de participants aux travaux de la HAS. Mais, selon notre recherche, au 15 juin 2008, la liste des déclarations d’intérêts des participants aux guides de la HAS n’est pas exhaustive. Elles ne sont pas rangées par guide ni par publication, mais par catégories de personnel (experts, membres du collège, etc.). Obtenir la totalité des déclarations d’intérêt et améliorer l'ergonomie de l'accès à ces déclarations est indispensable.

Des points à améliorer

Un label ne garantit pas, à lui seul, la qualité ; celui de la HAS ne fait pas exception. Il faut évaluer au cas par cas la qualité d’un guide pour aider les soignants. Au final, aide-t-il à mieux soigner ?
Pour aller vers la qualité, la HAS doit faire participer systématiquement au groupe de travail et de relecture des représentants des différentes personnes intéressées par un guide ; publier les déclarations d’intérêts des représentants du groupe de travail et faire figurer ces déclarations dans les documents constitutifs du guide ; améliorer la qualité des fiches de synthèse qui représentent le maillon le plus faible des guides de pratique clinique de la HAS.
Il s’agit de contribuer solidement à aider les professionnels à assurer des soins de meilleure qualité.

©Prescrire 15 septembre 2008
Rev Prescrire 2008 ; 28 (299) : 706.