Prescrire, article en une, PSA et dépistage des cancers localisés de la prostate, juin 2009
Prescrire  Accueil 
 
Article en Une - Archive
PSA et dépistage des cancers localisés de la prostate
   
Des bénéfices mal démontrés, des effets indésirables avérés et des questions en suspens.
Pour en savoir plus
 


PSA et dépistage des cancers localisés de la prostate
Rev Prescrire 2009 ; 29 (308) : 437-443.
Réservé aux abonnés
Cliquez ici

Cancers localisés de la prostate chez les seniors
Accès libre
Cliquez ici

Choisir d'attendre
Accès libre
Cliquez ici

La découverte de cancers localisés de la prostate est devenue fréquente en raison de la large utilisation du dosage de l'antigène spécifique prostatique (PSA) et de la promotion du dépistage de ces cancers. Le dosage du PSA est souvent associé au toucher rectal.

Quelle est la balance bénéfices-risques de cette méthode de dépistage pour les participants ? Pour répondre, nous avons réalisé une synthèse selon la méthode habituelle de Prescrire.

Le taux de PSA est statistiquement corrélé à la présence d'un cancer de la prostate. Le seuil de 4 ng/ml est généralement retenu comme référence de limite supérieure de “normalité” du PSA sérique total.

Les performances diagnostiques de ce test sont une sensibilité d'environ 70 % et une spécificité d'environ 85 %. Les performances des variantes du PSA sérique total (PSA libre ou autres) ne semblent pas meilleures. Le taux de PSA s'élève aussi avec l'âge et le volume prostatique, ce qui diminue la spécificité de cette mesure.

Dans environ 70 % des cas où le PSA sérique total est supérieur à 4 ng/ml, il n'y a pas de cancer prostatique détecté.

Le toucher rectal semble détecter moins de cancers prostatiques que le dosage du PSA, mais pas exactement les mêmes. Ses performances varient selon l'opérateur.

On dispose des résultats de quatre essais randomisés du dépistage des cancers de la prostate fondé sur un dosage du PSA, associé ou non à un toucher rectal.

Deux de ces essais sont terminés. Les résultats de l'essai québécois sont biaisés : les participants du groupe témoin ont été suivis moins longtemps que les participants du groupe dépistage. L'autre essai, suédois, n'a pas montré d'avantage en termes de mortalité par cancer de la prostate chez 9 000 hommes suivis 15 ans.

En mars 2009, des résultats intermédiaires de deux vastes essais randomisés, financés sur fonds publics étatsuniens et européens, ont été publiés. Les résultats finaux ne sont pas attendus avant les années 2010.

Dans l'essai étatsunien chez 76 693 hommes, au bout d'environ 9 ans, les résultats sont en défaveur du dépistage sur la mortalité par cancer de la prostate. Mais il faut attendre les résultats définitifs pour disposer de données de meilleure qualité, car une forte proportion des hommes non dépistés ont eu malgré tout un dosage du taux de PSA, ce qui réduit la puissance statistique de l'essai.

Dans l'essai européen, certains participants ont été exclus de l'analyse intermédiaire et le protocole de dépistage a varié selon les pays et les périodes. 182 160 hommes ont été pris en compte dans l'analyse intermédiaire publiée en 2009. La mortalité par cancer de la prostate a été plus faible dans le groupe dépistage : 2,6 dé-cès par cancer de la prostate pour 1 000 dans le groupe dépistage, versus 3,3 pour 1 000 dans le groupe témoin. Il n'y a pas eu d'effet sur la mortalité totale.

Les résultats faussement positifs du dosage du PSA sont souvent source d'inquiétude, et de répétition accrue des biopsies prostatiques. Dans l'essai européen, environ 21 % des participants du dépistage ont eu un taux de PSA considéré anormal, qui après exploration complémentaire s'est avéré être un faux positif.

Le dépistage des cancers de la prostate conduit entre autres à des diagnostics par excès, c'est-à-dire conduisant à la découverte de cancer dénué de conséquence clinique au cours de la vie. Ces diagnostics par excès exposent les patients aux effets indésirables des traitements envisagés (prostatectomie, radiothérapie) : incontinence urinaire, troubles de l'érection, etc. Dans l'essai européen, le dépistage a augmenté de 86 % le nombre de patients traités pour cancer de la prostate.

Le profil d'effets indésirables de la biopsie prostatique est principalement constitué de fièvre, de douleurs, d'hémospermies, d'hématuries, de rétentions aiguës d'urine, de prostatites, et de septicémies. Quelques décès dus à une septicémie ont été imputés à des biopsies prostatiques.

En pratique, mieux vaut informer sans parti pris les patients qui envisagent un dépistage du cancer prostatique : absence de preuve suffisante d'un avantage clinique au regard des risques avérés, notamment liés aux diagnostics inutiles. En mai 2009, un dépistage systématique du cancer de la prostate, par dosage du PSA ou toucher rectal, n'est pas justifié.

©Prescrire 1er juin 2009
Rev Prescrire 2009 ; 29 (308) : 437-443.