Revue Prescrire, article en une, effets indésirables juillet 2002
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Médicaments récents : se préoccuper des effets indésirables
 
Certains effets indésirables graves d'un médicament ne se révèlent parfois qu'après commercialisation
Idées-forces
Pour les médicaments qui ne sont pas un véritable progrès thérapeutique, il n'est pas justifié d'accepter des risques liés à la méconnaissance des effets indésirables au moment de la commercialisation

Le risque de voir reconnus des effets indésirables graves après la commercialisation d'un médicament est d'autant plus grand que l'évaluation conduisant à l'AMM est insuffisante et la mise sur le marché hâtive

La sous-notification des effets indésirables par les professionnels de santé retarde l'alerte sur de nouveaux effets indésirables

Les décisions qui découlent de l'évaluation des effets indésirables ne doivent pas se limiter à des demi-mesures

Du point de vue des patients, lorsqu'un médicament entraîne des effets indésirables graves alors qu'il existe des alternatives moins risquées ou que le trouble traité est bénin, il n'y a pas de justification à se contenter de l'ajout d'une mise en garde sur le résumé des caractéristiques du produit

10 % des nouveaux médicaments mis sur le marché aux États-Unis d'Amérique au cours des 25 dernières années ont fait l'objet de retrait du marché ou de mises en garde majeures à la suite d'effets indésirables graves parfois mortels. En France ou en Europe, nous avons quelques exemples de médicaments retirés du marché peu après la commercialisation ou dont la commercialisation a avorté.

États-Unis d'Amérique
Entre 1975 et 2000, 45 nouveaux médicaments (sur 548 nouveaux principes actifs) ont fait l'objet d'une ou plusieurs mises en garde majeures (8,2 %). 16 ont été retirés du marché. Pour 5 d'entre eux, le retrait a été précédé d'une mise en garde majeure :
- la terfénadine (ex-Teldane°)
- l'astémizole (ex-Hismanal°)
- le cisapride (Prepulsid°), qui n'a toujours pas été retiré du marché en France.
Pour en savoir plus : Cisapride : un retrait qui se fait attendre (réservé aux abonnés)
- l'encaïnide, un antiarythmique non commercialisé en France
- la troglitazone, un antidiabétique oral non commercialisé en France, voisin de la rosiglitazone (Avandia°) et de la pioglitazone (Actos°).
La plupart des 16 médicaments retirés du marché appartiennent à des classes déjà bien pourvues. Certains avaient reçu une autorisation de mise sur le marché malgré l'identification d'effets indésirables graves dans les essais cliniques.

En France ou en Europe
Parmi les exemples récents de médicaments retirés du marché peu après la commercialisation ou dont la commercialisation a avorté : la tolcapone (ex-Tasmar°), un antiparkinsonien, a été retirée du marché 2 mois après sa commercialisation du fait d'hépatites parfois mortelles ; le mibéfradil (ex-Posicor°), un inhibiteur calcique, n'a pas été commercialisé du fait d'interactions médicamenteuses graves, observées aux États-Unis ; le lévacétylméthadol (ex-Orlaam°) n'a pas été lancé en France du fait de troubles graves du rythme cardiaque. La cérivastatine (ex-Cholstat°, ex-Staltor°), un hypocholestérolémiant, a été retirée du marché en 2001 pour rhabdomyolyses mortelles.
Pour en savoir plus sur le bilan des médicaments retirés en France de 1990 à 1999 : Arrêts de commercialisation des médicaments, 10 ans d'expérience de la revue Prescrire (172 Ko, pdf).

Risque mortel : l'ampleur des dégâts reste mal connue
On manque de données pour évaluer le nombre de patients touchés par les effets indésirables : on estime à 10 % le taux des effets indésirables notifiés au système américain de pharmacovigilance. En France, les études montrent que la sous-notification des effets indésirables est très importante aussi.
La prescription des médicaments récents est souvent massive, largement influencée par la promotion des firmes. Pour en savoir plus : Hypolipidémiants : prescription sous influence (66 Ko, pdf) . Malgré la faible évaluation clinique de la cérivastatine, 500 000 patients environ ont été traités par cette statine, ensuite retirée du marché.

Revue Prescrire n°230, juillet/août 2002 : 513-514

©La revue Prescrire 1er août 2002