L'ajout d'une injection
d'insuline à un traitement par antidiabétique oral est assez simple
à mettre en uvre et relativement peu contraignant pour les patients
diabétiques de type 2. Dans cette situation, l'insuline est un médicament
de maniement simple. Elle expose à peu d'effets indésirables et
n'a qu'un faible risque d'interaction médicamenteuse. Lorsque
cette option thérapeutique convient aux patients diabétiques hyperglycémiques
malgré un traitement oral, il n'y a pas lieu de chercher à la retarder.
Les patients et les soignants
ont parfois des idées fausses sur le traitement par insuline.
L'injection d'insuline n'est
pas douloureuse. Dans la grande majorité des cas, la finesse des aiguilles
utilisées rend l'injection sous-cutanée moins douloureuse que le
prélèvement de sang capillaire au bout du doigt. Une façon
de le faire vérifier est d'injecter au patient 1 ou 2 unités d'insuline
(à température ambiante), qui n'auront aucun effet notable sur sa
glycémie. L'injection
d'insuline n'est pas compliquée. La préparation et la réalisation
d'une injection sous-cutanée d'insuline à l'aide d'un stylo injecteur
d'insuline demande peu de manipulations et se fait rapidement. Les patients apprennent
habituellement à réaliser assez correctement ces gestes après
quelques minutes de manipulation. La simplicité actuelle des stylos injecteurs
d'insuline permet à la plupart des patients de réaliser eux-mêmes
leurs injections sans avoir recours à un infirmier.
L'installation
du traitement par insuline nécessite de la pédagogie, mais pas une
hospitalisation. Dans les pays d'Europe du Nord, il est habituel de débuter
l'insulinothérapie des diabétiques de type 2 en ambulatoire.
Le
traitement par insuline perturbe peu les habitudes de vie. Dans le traitement
associant une seule injection quotidienne d'insuline d'action prolongée
au coucher et un antidiabétique oral, l'horaire de l'injection d'insuline
perturbe généralement peu les patients dans leur vie courante. Ce
type de traitement ne nécessite pas le respect d'horaires stricts pour
les repas ou l'injection. Le suivi des règles diététiques
n'a pas à être plus strict (ni moins strict) que sous traitement
oral exclusif. L'insuline supporte les températures ambiantes habituelles
pendant un mois à l'abri du soleil et des fortes chaleurs, ce qui ne gêne
pas la plupart des voyages.
L'insuline
n'est pas responsable des complications du diabète. Certains patients croient
que l'insuline est parfois à l'origine de complications, notamment ceux
qui ont connu une personne diabétique chez qui une amputation, un infarctus,
la mise en dialyse, ou le décès a suivi de quelques mois le début
du traitement par insuline. En réalité, dans l'essai UKPDS, d'une
durée médiane de 10 ans, le traitement par insuline en monothérapie
débuté dès la découverte du diabète a diminué
le risque d'apparition d'une complication microangiopathique du diabète,
sans modifier significativement le risque de complication macroangiopathique,
par rapport à un contrôle moins strict des glycémies par la
diététique en première intention. Mais la baisse de la
glycémie induite par l'insuline est susceptible d'aggraver une rétinopathie
pré-existante. Si celle-ci est préproliférante ou proliférante,
il est préférable d'attendre la réalisation d'une photocoagulation
laser avant de mettre en route le traitement par insuline. Dans les autres formes
de rétinopathie, une surveillance ophtalmologique, plus fréquente
après le début du traitement par insuline, est souhaitable.
Ce
n'est pas l'insuline qui fait la gravité du diabète. Le diabète
et ses complications sont en général une maladie abstraite pour
les patients. Tant que l'insuline est repoussée à plus tard, le
diabète n'est pas "grave", puisqu'il n'entraîne aucune
gêne. Les contraintes du traitement sont bien souvent la première
"complication" du diabète ressentie par les patients. Vouloir
éviter ce désagrément est légitime. L'information
des patients, distinguant les faits et les hypothèses, doit permettre de
mettre en balance, d'une part, les contraintes et les risques et, d'autre part,
les bénéfices possibles du traitement par insuline en termes de
prévention des complications futures.
Le
traitement par insuline n'est pas nécessairement définitif. Dans
le diabète de type 2, l'insuline n'est généralement pas vitale.
Elle n'est ni une "drogue" entraînant une dépendance dès
les premières injections, ni un traitement qui ne peut pas être interrompu
une fois débuté. Proposer un essai de traitement par insuline
pendant 3 mois, en s'engageant à l'arrêter à l'issue de cette
période si le patient le souhaite, permet au patient de constater par lui-même
les difficultés et contraintes éventuelles du traitement, ainsi
que d'éventuels bénéfices immédiats en termes de disparition
des symptômes d'hyperglycémie, s'ils étaient présents.
©La
revue Prescrire 15 juin 2005 Rev Prescrire 2005 ; 25 (262) : 443-449
(29 références). |