Revue Prescrire, article en une, suite, Europe et médicament juillet 2004
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Europe et médicament :
Ce qui change avec la nouvelle législation
Évaluation des médicaments : discrète apparition de la "valeur thérapeutique ajoutée"

Jusqu'à présent, les seuls critères retenus pour permettre la commercialisation d'un médicament étaient sa "qualité pharmaceutique", son "efficacité" et sa "sécurité d'emploi". Pas de changement dans ce domaine : il n'est toujours pas exigé d'évaluation clinique comparative, visant à déterminer si le nouveau médicament apporte un progrès thérapeutique (alias "valeur thérapeutique ajoutée"), pour le patient, par rapport aux traitements de référence déjà disponibles, médicamenteux ou non médicamenteux.

Le besoin de comparaison n'est plus occulté
Le Règlement 2004 prévoit qu' « à la demande de la Commission », l'Agence européenne du médicament recueillera « toutes les informations disponibles sur les méthodes utilisées par les autorités compétentes des États membres pour déterminer la valeur thérapeutique ajoutée apportée par un nouveau médicament » (R article 60). Rien n'est dit des suites données à cette enquête, mais son annonce rappelle que les États sont conduits à pallier les insuffisances de l'AMM pour faire le tri entre les nouveaux médicaments.
Le concept de "valeur thérapeutique ajoutée" apparaît aussi au détour d'un article de la Directive 2004 sur la protection des données (D article 10-1), et de l'article correspondant du Règlement : l'année supplémentaire de protection au titre d'une nouvelle indication thérapeutique (lire page 547) sera accordée si cette indication est jugée « lors de l'évaluation scientifique conduite en vue de l'autorisation, apporter un bénéfice clinique important par rapport aux thérapies existantes » (R article 14-11).

Ainsi, la comparaison des nouveaux médicaments aux traitements de référence déjà disponibles, réclamée avec force par différents acteurs des systèmes de santé, mais repoussée par les firmes pharmaceutiques, apparaît pour la première fois dans la réglementation européenne du médicament. Cette comparaison n'est pas obligatoire avant AMM, mais un petit pas a été fait dans la bonne direction.

Des essais éthiques quel que soit leur lieu de réalisation

La manière de conduire les essais cliniques pour évaluer les médicaments n'est pas abordée dans la Directive et le Règlement 2004 : d'autres textes spécifiques s'appliquent aux essais, et en particulier la Directive 2001/20/CE sur les bonnes pratiques dans les essais cliniques. Toutefois un document important a été ajouté dans la liste de ceux que doit fournir en Europe un demandeur d'AMM (par procédure nationale ou par procédure européenne centralisée)  : une « déclaration attestant que les essais cliniques effectués en dehors de l'Union européenne répondent (NDLR : comme ceux réalisés dans l'Union) aux exigences éthiques de la Directive 2001/20/CE » (D article 8-i ter, R article 6-1).

Ainsi les principes de la Directive 2001/20/CE, dont la transposition en droit français tarde beaucoup, doivent être respectés, qu'il s'agisse de protection des participants, de comités d'éthique, de notification des effets indésirables, même quand l'évaluation d'un médicament destiné aux Européens se déroule hors d'Europe.

©La revue Prescrire 1er juillet 2004