Revue Prescrire, article en une, suite, Collectif Europe et médicament Fiche 2
Prescrire     Accueil  
 
Article en Une - Archive
Les fiches du Collectif Europe et Médicament
 
Pourquoi faut-il réévaluer régulièrement les bénéfices et les risques des médicaments ?
Fiche n°2
22 juillet 2002

Il ne serait pas sérieux d'octroyer les autorisations de mise sur le marché pour l'éternité comme le proposent les projets de Directive et de Règlements européens.

Pour un usage optimal et responsable des médicaments, le Collectif Europe et Médicament souhaite une réévaluation régulière et sérieuse ainsi qu'une mise à jour de l'information des professionnels de santé et des patients.

English

Toutes les fiches

Fiche précédente

Fiche suivante

Collectif Europe et médicament
Cliquez ici

Quand un médicament est mis sur le marché pour la première fois, ses effets ont été étudiés sur quelques centaines, parfois quelques dizaines, au mieux quelques milliers de malades. Les études pour déterminer la dose optimale ont inclus beaucoup moins de patients encore. L'efficacité a souvent été testée chez des adultes d'âge moyen, très sélectionnés, sans risque particulier. Les essais ont été réalisés selon un protocole très strict, dans des conditions très différentes de la vie quotidienne des patients. Les informations sur les effets indésirables sont succinctes, vu le petit nombre de malades traités et le manque de recul. Les études d'interactions avec d'autres médicaments n'ont porté que sur quelques dizaines de sujets.

Rapidement, dès sa mise sur le marché, le médicament va être utilisé par des dizaines ou des centaines de milliers de patients, voire plus. Les malades vont prendre le médicament dans des conditions différentes des conditions expérimentales initiales: de façon plus ou moins régulière, avec d'autres médicaments, des aliments, de l'alcool, etc. Des personnes âgées, ou à risque particulier du fait de diverses maladies associées, vont présenter des effets inattendus. Certains patients vont l'utiliser à doses plus fortes; une consommation abusive peut se produire. D'autres vont utiliser le médicament à dose trop faible ou irrégulièrement, parce qu'ils ne ressentent pas l'effet attendu, ou que la prise est difficile. Chez d'autres, des doses faibles vont se révéler suffisantes. Des effets indésirables vont apparaître, bénins ou graves.

Parallèlement, d'autres médicaments peuvent se montrer plus efficaces, ou aussi efficaces mais d'action plus rapide, ou plus commodes à utiliser, ou mieux tolérés. Des informations sur l'épidémiologie de la maladie considérée vont remettre en cause l'utilisation du médicament dans certaines situations. Des observations publiées vont parfois donner lieu à une réévaluation de la balance bénéfices/risques, dans un sens positif ou négatif.

Par exemple, depuis les années 1960, la spironolactone (ALDACTONE°) était surtout un diurétique utilisé pour des traitements symptomatiques. En 1999 ont été publiés des résultats d'un essai montrant une franche réduction de la mortalité chez certains insuffisants cardiaques.A l'inverse, le cisapride (PREPULSID°), un traitement symptomatique des nausées et du reflux gastro-oesophagien, s'est avéré au fil des années être une cause de troubles du rythme cardiaque mortels, alors que l'oméprazole le dépassait en efficacité.

Il n'est ni scientifiquement ni humainement concevable de laisser perdre toutes les données nouvelles qui apparaissent à propos d'un médicament. Laisser un médicament sur le marché sans faire périodiquement un bilan régulier de la balance entre ses bénéfices et ses effets indésirables pour les malades, comparativement aux autres traitements disponibles, c'est faire perdre des chances à certains malades.