Revue Prescrire, article en une, Europe et médicament septembre 2003 (5)
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Des amendements importants votés par le Parlement n'ont pas été repris par le Conseil européen des ministres de la santé.


Le Collectif Europe et Médicament a listé ci-dessous les points à réexaminer, proposant pour chacun un ou plusieurs amendements accompagnés d'une justification.

Représentation de la société civile (patients, consommateurs, professionnels de santé, organismes de protection sociale) au Conseil d'administration de l'Agence européenne du médicament (amendement 116 - article 58-1 du Règlement - voté par le Parlement, repris par le Conseil pendant les travaux préparatoires, puis retiré in fine).

Nouvelle proposition d'amendement - article 58-1 du Règlement (remplace) : "Le Conseil d'administration se compose de quinze membres désignés par le Conseil, après avis du Parlement européen donné dans un délai de trois mois, à partir d'une liste établie par la Commission qui comprend un nombre de candidats plus élevé que le nombre de membres à nommer, ainsi qu'un représentant de la Commission. Deux des membres retenus doivent être issus d'organisations industrielles (dont un représentant les producteurs de médicaments génériques), un d'organisations de patients, un d'organisations de professionnels de santé, un d'organismes d'assurance maladie. Les membres du Conseil d'administration sont désignés de manière à garantir un niveau de compétence élevé et un large éventail d'expertise et, dans le respect de ces critères, la répartition géographique la plus large possible au sein de l'Union".

Justification : le Parlement européen et le Conseil des ministres européens de la santé ont adopté le principe de l'application à l'Agence européenne du médicament du règlement sur l'accès aux documents. De ce fait, cette institution sensible pourra être transparente pour les citoyens européens, ce qui constitue une garantie essentielle à son bon fonctionnement. La présence de représentants des citoyens au sein du Conseil d'administration de l'Agence, est une garantie supplémentaire de bon fonctionnement, notamment pour l'application des règles de transparence.

Davantage de financement public pour l'Agence européenne du médicament (pour la base de données sur les médicaments, et pour les tâches de régulation : autorisations de mise sur le marché notamment) (amendements 152 et 91 - respectivement considérant 17 bis et article 51-1-2-j du Règlement - votés par le Parlement, non repris par le Conseil).

Nouvelle proposition d'amendement - considérant 17 bis du Règlement (nouveau) : "Le budget de l'agence doit être constitué de contributions provenant du budget communautaire aux fins de la mise en œuvre des politiques communautaires et de redevances versées par le secteur privé. Les tâches essentielles de régulation de l'agence, qui contribuent à la sécurité sanitaire et à la protection du consommateur, pour ce qui concerne les médicaments, doivent être entièrement couvertes par le budget communautaire".

Nouvelle proposition d'amendement - article 51-1-2-j du Règlement (complète) : " (…) et assurer la maintenance de cette base de données de manière indépendante des firmes pharmaceutiques, grâce à un financement provenant du budget communautaire.

Justification : la question du financement des agences du médicament, aujourd'hui posée dans le monde entier, est particulièrement importante pour l'Agence européenne qui concerne un large ensemble d'États. Exemple : une base de données sur les médicaments financée par l'industrie pharmaceutique (au moyen des redevances payées par les firmes) ne permettrait pas de réellement comparer les médicaments entre eux : quelle firme aurait intérêt à laisser apparaître aux yeux du public que son médicament est moins bien évalué et n'a donc pas certaines indications des concurrents, ou que des effets indésirables plus nombreux ou plus graves ont été observés avec son médicament ?

Financement public pour les activités de pharmacovigilance des agences nationales, comme prévu pour l'Agence européenne (amendement 117 - article 102 bis de la Directive - voté par le Parlement, non repris par le Conseil).

Nouvelle proposition d'amendement - article 102 bis de la Directive (nouveau) : "Pour garantir une totale indépendance des autorités compétentes, en vue d'assurer la sécurité sanitaire et la protection des consommateurs, les activités liées à la pharmacovigilance et à la surveillance du marché doivent bénéficier d'un financement public à la hauteur des tâches conférées à ces autorités".

Justification : le domaine de la pharmacovigilance est extrêmement sensible, comme on a pu le voir lors de récentes affaires concernant la cérivastatine, les anorexigènes, le vaccin contre l'hépatite B, les anti-inflammatoires dits anti-COX 2, etc. La mise en évidence d'un effet indésirable peut avoir des effets financiers négatifs très importants pour une firme, et la tentation est grande pour les firmes de ne pas tout dire dans ce domaine. Seul un financement public peut donner aux agences nationales, comme à l'Agence européenne, l'indépendance nécessaire pour analyser dans le calme les données de pharmacovigilance et prendre les mesures qui s'imposent. C'est pour cela que le principe d'un financement public a été adopté pour les activités de pharmacovigilance de l'Agence européenne du médicament. Il est également nécessaire pour les agences nationales.

Participation de scientifiques de terrain à la Commission d'autorisation de mise sur le marché de l'Agence européenne du médicament, et pas seulement de représentants des agences des États membres (article 54-1-2 du Règlement, mais pas d'amendement voté en première lecture).

Nouvelle proposition d'amendement - article 54-1-2 du Règlement (nouveau) : (…) "Chaque membre doit être accompagné en permanence d'un expert scientifique indépendant également nommé par le Directeur exécutif, chaque État étant ainsi représenté par un tandem administratif et scientifique. (…)".

Justification :
il est difficile pour les représentants des administrations des États de ne tenir aucun compte des intérêts nationaux, qu'ils soient administratifs ou industriels ; et il est quasiment impossible pour ces représentants de se mettre en contradiction avec l'agence de leur propre pays ou avec une grande industrie pharmaceutique implantée dans leur pays. Ces dernières années, des insuffisances d'évaluation des nouveaux médicaments, ou dans l'analyse des effets indésirables suspectés d'anciens médicaments, ont été révélées par des scientifiques de la Commission d'autorisation de mise sur le marché, et mises en rapport non seulement avec des défauts de compétence, mais aussi avec un manque d'indépendance vis-à-vis d'États ou de firmes.

Saisine obligatoire du comité scientifique de l'Agence européenne en cas de décisions divergentes d'États membres à propos d'un même médicament (amendement 64 - article 30 de la Directive - voté par le Parlement, non repris par le Conseil).

Nouvelle proposition d'amendement - article 30 de la Directive (remplace) : "Lorsqu'un médicament fait l'objet de plusieurs demandes d'autorisation de mise sur le marché, introduites conformément aux articles 8, 10 et 11 et que des États membres ont adopté des décisions divergentes concernant son autorisation de mise sur le marché, sa suspension ou son retrait, les différences qui apparaissent en conséquence entre les Résumés des caractéristiques de ces médicaments dans la base de données européenne définie à l'article 51-1 du Règlement (ajouter n° définitif après adoption) doivent être portées à la connaissance du Comité des médicaments humains de l'Agence européenne du médicament. Le Comité doit rendre un avis sur ces divergences, et cet avis doit être rendu public immédiatement. En cas de divergence majeure entre les décisions des États, la procédure prévue à l'article 32 s'applique".

Justification : à l'époque du marché unique, il est déroutant pour les citoyens des différents pays de l'Union de se trouver confrontés à des médicaments qui n'ont pas les mêmes indications, la même posologie, le même statut réglementaire, la même notice, dans les différents pays de l'Union. La bonne harmonisation du marché ne doit pas se faire seulement de manière administrative ; elle implique l'analyse scientifique des données disponibles dans les différents pays. Pour avoir une chance d'être bien comprise, elle doit en outre tenir compte des habitudes thérapeutiques en cours dans les États membres. De multiples exemples ont montré l'utilité des avis du Comité et des groupes de travail scientifiques de l'Agence, qu'il s'agisse de contraception, de diabétologie, de cardiologie, de neuro-psychiatrie, etc.

©Collectif Europe et Médicament 1er septembre 2003