Le projet de loi sur le médicament prévu pour être adopté à l'automne 2011 en France comporte de nombreux points d'amélioration en termes de transparence des autorités sanitaires, de gestion des conflits d'intérêts des experts et des personnels des agences, d'encadrement des dispositifs médicaux, d'encadrement des utilisations de médicaments en dehors de l'Autorisation de mise sur le marché ("hors AMM") et d'encadrement de certaines formes de publicité (dont la visite médicale).
Mais ce projet de loi est en retrait sur de nombreux points par rapport aux recommandations de l'Assemblée nationale et du Sénat, aux préconisations de l'Inspection générale des affaires sociales (IGAS), et aux conclusions des Assises du médicament.
Les insuffisances graves de l'encadrement du marché du médicament, au détriment des patients, ont été révélées par l'affaire Mediator°, bien au-delà de ce médicament, de la firme concernée et de la France. Soignants et patients attendent aujourd'hui des améliorations profondes, seules à même de redonner durablement confiance dans les autorités sanitaires, les médicaments, et le système de soins.
En mars 2011, Prescrire a publié 57 propositions pour réorienter la politique du médicament au bénéfice des patients en France et en Europe. Le 14 septembre, Prescrire publie des propositions d'amélioration du projet de loi, qui reprennent notamment nombre de recommandations exprimées par les parlementaires.
Pour protéger les patients, les principaux points à améliorer sont les suivants :
- assurer une transparence complète sur les avis et les décisions des agences, y compris par un accès libre aux documents qui étayent ces avis et ces décisions ;
- gérer les conflits d'intérêts en prenant en compte l'influence des liens même apparemment "mineurs" (il n'existe pas de seuil en dessous duquel un cadeau ou un avantage n'a pas d'influence) ;
- étendre la gestion des conflits d'intérêts à toutes les professions de santé et à toutes les instances chargées des produits de santé, aux échelons locaux comme à l'échelon national ;
- exiger une évaluation comparative des médicaments, en les comparant aux traitements de référence ;
- prendre en compte la praticité des médicaments (conditionnement, information, dispositif d'administration, etc.) lors de leur évaluation ;
- rendre obligatoire rapidement la prescription en DCI, sans exception ;
- développer l'analyse et la prévention des erreurs au cours des soins ;
- développer les centres régionaux de pharmacovigilance, échelon de premier recours du système national de pharmacovigilance ;
- renforcer la formation des soignants en santé publique, en pharmacologie clinique et en thérapeutique ;
- développer la formation et l'information du grand public en termes de santé, de prévention, et de médicament ;
- développer un financement des activités stratégiques en matière de médicament qui soit indépendant des firmes pharmaceutiques : recherche clinique, formations initiale et continue des soignants, associations de patients, éducation thérapeutique.
Prescrire invite parlementaires et gouvernement à profiter de l'occasion historique offerte de réorienter durablement et profondément la politique du médicament en France au profit des patients, sans s'arrêter au milieu du gué. Et en apportant un souffle nouveau à l’échelle européenne.
©Prescrire 14 septembre 2011