prescrire.org > Libre Accès > Faire progresser les politiques de santé > Conditionnements des médicaments et sécurité des soins > Les bilans annuels du conditionnement > Reconstruire après Mediator° (Année 2011)

Faire progresser les politiques de santé

Conditionnements des médicaments et sécurité des soins

Les bilans annuels Prescrire du conditionnement
Reconstruire après Mediator° : le conditionnement demeure un vaste champ de progrès pour les Agences du médicament (Année 2011)

L'affaire Mediator° a provoqué en 2011 un sursaut de l'Agence française du médicament. Mais diverses mesures d'encadrement prises par l'Agence en 2011 ont négligé l'aspect conditionnement.

Conditionnement, parent pauvre des réévaluations
Par exemple, la réévaluation de médicaments pédiatriques couramment utilisés tels les antitussifs, n'a comporté aucune remise en cause de leur conditionnement, pourtant globalement dangereux (cliquez ci-contre "Les enfants ont un grand besoin d'amélioration"). De même, la soumission de la pholcodine à prescription médicale obligatoire n'a été l'occasion d'aucune exigence de progrès en matière de conditionnement (lire p 137 de "L'Année 2011 du médicament"
> Pdf, accès libre).

La décision d'améliorer les étiquetages des formes orales de méthotrexate est bienvenue, mais ne suffit pas à sécuriser pleinement le conditionnement des spécialités concernées. Il manque l'exigence d'une meilleure solution que les flacons-vrac dangereux, telles que des plaquettes sécurisées accompagnées d'un accessoire facilitant l'extraction des comprimés ou gélules des plaquettes pour les patients ayant des difficultés de préhension.

En 2011, en France, la quinine est restée malheureusement commercialisée dans les crampes. La décision de ne plus la rembourser par la Sécurité sociale va certes diminuer le nombre de patients exposés à ses effets indésirables, mais pas au point de l'annuler (n° 337 p. 820). Or une notice informative sur les effets indésirables manque toujours aux spécialités concernées, de même qu'il manque un bouchon-sécurité au flacon d'Okimus° et la mention « quinine » sur les plaquettes d'Hexaquine° (a).

La soumission de la méquitazine à prescription médicale n'a rien changé au fait qu'il manque toujours un bouchon-sécurité au flacon, et qu'une cuillère-mesure reste plus imprécise qu'une seringue orale adaptée (n° 337 p. 819).

Les restrictions de prescription du clonazépam – Rivotril° n'ont rien changé au fait qu'il manque un bouchon-sécurité au flacon, qu'un compte-gouttes est un dispositif doseur moins performant qu'une seringue orale adaptée, et que la lisibilité des plaquettes et de la notice des comprimés est insuffisante (n° 337 p. 822).

Gammes ombrelles : témoin du laxisme des autorités
En matière de qualité du conditionnement, l'état du marché laisse penser que les agences françaises et européennes du médicament sont trop souvent à la remorque des firmes : en particulier en automédication, avec les gammes "ombrelles". En 2011, à défaut d'une interdiction de ces gammes, la dérive s'est accentuée avec l'autorisation d'une oxomémazine dont le flacon est sans bouchon-sécurité, le doseur (un gobelet) à risque de surdose et les étiquetages trop fantaisistes (n° 337 p. 825).

Différences entre princeps et génériques : affaire de régulation
Des différences de caractéristiques (dosages, concentrations, présentations) constatées entre princeps et copies sont parfois sources d'erreurs médicamenteuses. Par exemple, le changement de formulation des princeps à base de périndopril a créé une différence d'expression des dosages par rapport aux copies, source de surdose (n° 316 p. 110 ; n° 327 p. 14) ; des risques sont à prévoir suite aux changements survenus avec le docétaxel – Taxotère (n° 327 p. 19), créant une différence de forme et de concentration par rapport aux copies. En 2011, une copie à base de lidocaïne + adrénaline a été jugée source d'erreur car sa concentration en adrénaline diffère de celle du princeps (1).

Les agences sont pourtant tenues de placer la sécurité des patients en priorité dans leurs décisions, et devraient anticiper les différences pratiques entre princeps et copies.

Une première réaction de l'Afssaps en 2011
Au cours de l'année, Prescrire a reçu de l'Afssaps un courrier en réaction au bilan Prescrire 2010 du conditionnement (2). Selon ce courrier, les cas exposés dans ce bilan sont à l'étude au sein de l'Agence.

Par ailleurs, le projet de l'Agence de réévaluer les AMM antérieures à 2005 permet d'espérer le retrait d'AMM de médicaments aux rapports bénéfices-risques négatifs, et d'éviter ainsi le rafistolage de conditionnements dangereux. Pour les AMM à maintenir, le projet gagnerait à tenir compte davantage de l'aspect conditionnement (3).

Analyser réussites et échecs
Plus généralement, mieux vaut que les Agences du médicament étudient de près le marché sous l'angle du conditionnement, de façon à repérer les réussites aussi bien que les échecs. Cela permettrait aux Agences de guider en toute connaissance de cause les firmes pour qu'elles développent toutes des conditionnements sûrs et adaptés, au service des divers types de patients concernés par les médicaments.

Note :
a- La firme a annoncé une plaquette avec les DCI : lire dans le n°340  p. 156. > Pdf, réservé aux abonnés

Extrait de la veille documentaire Prescrire
1- Afssaps "Différence de concentration en adrénaline entre la Lidocaïne Aguettant Adrénaline et Xylocaïne Adrénaline" avril 2011 : 1 page.
2- Afssaps "Bilan 2010 du conditionnement paru dans Prescrire de février 2011" Courrier à Prescrire 8 août 2011 : 2 pages + réponse de Prescrire 1er septembre 2011 : 2 pages.
3- Prescrire "Permettre l'examen simpliflé des modifications des termes des AMM purement nationales ? Oui, mais d'abord réévaluer les "vieilles AMM" nationales" Réponse à la consultation publique de la Commission Européenne 21 octobre 2011 : 4 pages. > Pdf

©Prescrire Février 2012

Rev Prescrire 2011 ; 32 (340) : 141-147 (pdf, accès libre)